Première date de publication : 25/01/2013
Date de la dernière mise à jour : 30/01/2013
Comme vous le savez, je n’ai pas pour habitude de m’occuper (souvent par absence totale d’avis tranché) des débats dits « de société »... Cependant, compte tenu du foin médiatique autour des questions posées en titre, il faut bien que je vous rapporte les différents échanges que j’ai pu avoir à ce sujet.
Préalables...
Il faut que je vous avoue un truc, ma « vraie » position, celle dans « l’idéal » (celui qui n’existe pas), c’est que je pense qu’il faudrait totalement supprimer du Code civil, tous les textes relatifs au mariage et s’intéresser seulement à ceux qui concernent la filiation, c'est-à-dire, là où il y a des vrais enjeux...
Je ne vois vraiment pas de quoi la loi se mêle quand elle se propose de dire le « bien et le mal » dans les rapports qui unissent des partenaires de vie, quels qu’ils soient.
La loi impose l’égalité des droits, de même qu’elle oblige à la protection et au respect des individus : interdit de la violence, de l’emprise, de la domination, de la pédophilie, du viol, et cetera, et cetera... À mon sens, c’est bien suffisant pour régir les rapports humains et même, pour déclarer illégaux des mariages religieux qui ne respecteraient pas nos lois.
Aussi, je ne vois pas pourquoi la loi en rajoute avec le mariage républicain, sauf à nourrir des avocats et à encombrer les bureaux des juges ou les prétoires de justice, puisque presque un mariage sur deux (46,2 % !) se termine par un divorce ; et parmi ceux qui restent, malgré tout, mariés, nous en connaissons tous beaucoup qui se demandent pourquoi, ils n’ont pas le courage de divorcer ou s’accommodent de situations qui n’ont pas grand-chose à voir, ou ne respectent en rien, les articles 212 à 226 du Code civil...
En l’absence de mariage civil, libre à chacun de « sacraliser » son union dans les termes qui seront, par ailleurs, conformes à ses croyances et désirs... De même, libre à chacun de contractualiser, ou non, devant notaire, le type d’union matérielle qu’ils souhaitent, selon tous les régimes possibles de contrat ou de société en participation, calqué sur ceux du mariage : communauté universelle, réduite aux acquêts ou en séparation de biens... et de régler dans le même temps les problèmes de succession, sans que tout cela n’implique en rien un « mariage ».... Il est à noter d’ailleurs que tout ça a toujours pu se faire, sans mariage et sans PACS !....
Cependant, les arguments et développements de deux articles :
- Mariage civil, mariage religieux : une contrariété révélée par le « mariage homo » ; de Catherine Kintzler (Chevalier de la Légion d’Honneur ),
- Le « mariage homo », la nature et l'institution : quelques réflexions ; de Jean-Michel Muglioni,
m’ont convaincu qu’il ne fallait pas laisser le champ libre aux religieux soi-disant orthodoxes ; ceci, tant qu’ils continueront à vouloir imposer leurs diktats, leurs dogmes, leurs croyances, ainsi qu’à se mêler de ce qui ne les regarde pas, et à imposer leur « charia » qu’elle qu’en soit l’origine... De plus Catherine, avance une démonstration très pertinente, sur la notion de « mariage civil », qui n’a, à l’évidence, pas grand-chose à voir avec celle des religions, parce que non basée sur les mêmes fondements et qu’il est par nature totalement autre chose... c’est bien ce que révèle, d'ailleurs, en pleine lumière l’opposition de certains religieux au « mariage pour tous ».
Aussi, je me suis rallié à la nécessité et à la légitimité d’étendre le droit au mariage aux couples homos ; et je vais tenter de vous démontrer par les faits, rien que par les faits (car, vu le nombre d’arguties développé contre, juridique, philosophique, politique, linguistique, catastrophiste, ... cela nécessiterait trop de temps de les réfuter un par un), que les arguments qui s’opposent à cette loi sont dépourvus du moindre fondement réel.
À partir de quels arguments, peut-on vraiment discuter et réfléchir ?...
Compte tenu des fondements religieux de beaucoup d’opposants, il faut commencer par évoquer le choquant « passage à l’acte » de certains représentants du Livre, quand ils s’autorisent ex cathedra à dicter leurs lois aux hommes.
Il faudrait régulièrement rappeler à certains « théologiens », qu'en se mêlant de la loi laïque, ils enfreignent régulièrement 3 lois du Décalogue (et sont donc promis à la damnation) :
- Tu n'auras pas d'autres dieux devant ma face.
- Tu ne te feras point d'image taillée, ni de représentation quelconque des choses qui sont en haut dans les cieux, qui sont en bas sur la terre, et qui sont dans les eaux plus bas que la terre.
- Tu ne te prosterneras point devant elles, et tu ne les serviras point ; car moi, l'Éternel, ton Dieu, je suis un Dieu jaloux, qui punis l'iniquité des pères sur les enfants jusqu'à la troisième et la quatrième génération de ceux qui me haïssent.
Si on considère que ces religions indiquent des chemins qui doivent conduire à la « libération » et que le sens des mots est symbolique ; alors, on peut comprendre ces lois, dictée par un « surmoi spirituel », ainsi :
- seule ma parole est vraie pour toi, (ton inconscient est unique, il n’appartient qu’à toi et n’a force de vérité que pour toi)
- tu ne retranscriras jamais dans la réalité ce que je te dis ; les choses de l’esprit doivent y rester, et ne doivent pas communiquer, ni influencer le monde matériel, (ton inconscient doit rester en toi, il n’a de valeur directrice que pour toi)
- tu ne devras jamais croire ou te mettre au service d’images ou de quelqu’un qui serait censé me représenter ; et si tu crois en quelqu’un ou quelque chose qui te dirait qu’il me représente, alors tu deviendras fou et tu rendras fou tes descendants... (te mettre au service et croire que quelqu’un d’autre que toi-même détient une vérité sur toi, est le plus sûr chemin pour te conduire à la folie et ton entourage avec toi)
À la lumière de ce que l'on sait des mécanismes psychiques, ça peut se traduire très simplement par : les pulsions et les fantasmes doivent restés à l'intérieur de nos pensées, jamais extériorisés ou matérialisés (sauf pour en faire de l'art, mais certainement pas une religion), et jamais on ne doit prendre ses pulsions et ses fantasmes pour des vérités universelles. Si tu te mets au service de ceux qui te disent ce que tu dois penser, ressentir et faire, ce seront forcément des imposteurs qui te rendront fou...
C’est cette analyse symbolique qui me conduit à penser que, tout humain qui voudrait faire une exploitation « terrestre » des lois de « Dieu » est en état de « péché mortel ». Matérialiser dans la réalité (la terre) un « Dieu », quelle qu’en soit l’origine, en faire une obligation pour tous et se prosterner devant sa représentation, est la pire transgression qu’on peut faire vis-à-vis de son Dieu...
Un enseignement d’une grande sagesse, si on le décrypte tel que maladroitement je vous le propose, qui nous aurait évité bien des procès en hérésie, des massacres, des tueries et des guerres... et pas seulement religieuses, politiques aussi, quand cette dernière devient une « religion »...
Bref, ce sont des commandements qui sont censés nous indiquer un chemin intérieur qui n'a aucune vocation à devenir la loi des hommes, ainsi qu'à nous protéger des « faiseurs de vérités » et de la folie. Ceux qui l'oublient nous démontrent tous les jours qu'ils ont besoin de se faire soigner... comme nous le prescrit très sagement la Bible, le premier manuel de psychopathologie symbolique que l'homme ait conçu....
À ma connaissance, ces commandements ont été très peu commentés par les théologiens et pour cause, sinon il faudrait avouer que les pratiques sont contraires aux enseignements, tandis que tout pouvoir temporel deviendrait injustifiable et même une hérésie.
On ne s’étonnera donc pas que tous les schismes religieux ou les accusations en hérésie, quels qu’ils soient, ont tous à la base des désaccords fondamentaux sur l’interprétation du « rôle » politique que devait jouer les religieux, et consécutivement à la représentation terrestre qu’il fallait donner à la « parole de Dieu ».
Cherchez bien, vous verrez que c’est le cas pour tous : les protestants, les cathares, les orthodoxes, les anglicans, ... mais aussi les ibadites, les soufis, et cetera... Cette « mésentente » sur la « représentation terrestre » est à la base de toutes les guerres, intra et inter, religieuses ; et on remarquera que les plus pacifistes et tolérants sont toujours ceux qui ont totalement dissocié pouvoir politique et spirituel... ça se vérifie toujours et partout.
Comparativement, quand on songe à l’attitude des bouddhistes qui ont parfaitement intégré la notion de Maya dans leur enseignement, qui exclut de convoiter ou revendiquer tout pouvoir temporel, on se dit que les autres ont encore bien du chemin à faire pour se comprendre eux-mêmes et pour s’expliquer, enfin, à quoi ils servent ; mais il est vrai que selon certains ce n’est « même pas » une religion...
On remarquera encore l’attitude extrêmement respectueuse des protestants qui ne mélangent pas pouvoir politique et religieux, tandis qu’à l’intérieur de cette église certains pétitionnent même pour le mariage pour tous ; mais il est vrai que cela fait longtemps que cette église ne croit plus à l’Immaculée Conception, à la transsubstantiation, à la sacralité du mariage, et autres « balivernes folkloriques » papales... Ceci expliquant peut-être cela...
Et ne voyez dans mes mots aucun mépris, d’autant que depuis toujours, je pense que les églises ont des fonctions symboliques importantes ; par exemple, comme nous le suggère Michel Serres : « (...) Depuis le 1er siècle après Jésus-Christ, le modèle familial, c’est celui de l’église, c’est la Sainte Famille. Mais examinons la Sainte Famille. Dans la Sainte Famille, le père n’est pas le père : Joseph n’est pas le père de Jésus. Le fils n’est pas le fils : Jésus est le fils de Dieu, pas de Joseph. Joseph, lui, n’a jamais fait l’amour avec sa femme. Quant à la mère, elle est bien la mère, mais elle est vierge. La Sainte Famille, c’est ce que Lévi-Strauss appellerait la structure élémentaire de la parenté. Une structure qui rompt complètement avec la généalogie antique, basée jusque-là sur la filiation : on est juif par la mère. Il y a trois types de filiation : la filiation naturelle, la reconnaissance de paternité et l’adoption. Dans la Sainte Famille, on fait l’impasse tout à la fois sur la filiation naturelle et sur la reconnaissance, pour ne garder que l’adoption.
L’église donc, depuis l’Évangile selon Saint-Luc, pose comme modèle de la famille une structure élémentaire fondée sur l’adoption : il ne s’agit plus d’enfanter, mais de se choisir. À tel point que nous ne sommes parents, vous ne serez parents, père et mère, que si vous dites à votre enfant « je t’ai choisi », « je t’adopte, car je t’aime », « c’est toi que j’ai voulu ». Et réciproquement : l’enfant choisit aussi ses parents parce qu’il les aime. (...) ».
Étonnant et savoureux, non ? Personnellement, c’est à cette symbolique-là (celle qui ouvre l'esprit) que je souscris et je me demande bien, pourquoi l’Église résiste depuis tant de siècles à sa propre parole et est aussi peu cohérente avec sa propre symbolique, dans quasiment tous les domaines...
Il est à noter que ce « déplacement fonctionnel » n’épargne aucunement les « sachants » et autres « scientifiques » qui se prévalent de leur « savoir » pour dire le bien et le mal...
Il en est ainsi, notamment de certains psychanalystes qui à partir de constats cliniques voudraient nous dire ce que nous devons faire... Une absurdité et un « abus de savoir » aussi peu pertinents et justifiables, que si - sous prétexte que la frustration est bonne pour la structuration psychique (effectivement, ça se démontre dans certains cas et contextes) - on avait répondu aux syndicalistes que leur droit à revendiquer et à s'associer, est un « mauvais » désir et qu'ils seront plus heureux en s'en privant... C’est tout simplement n’importe quoi, et plus grave, une façon de perpétuer des confusions de niveau qui n’autorisent aucun débat ; comme le démontrent si bien, les dialogues de sourd que toute « discussion », entre les pour et les contre « le mariage pour tous », provoque sur ce sujet.
D'ailleurs, si on étendait tout ce que la médecine sait aujourd'hui sur les comportements à risque, c'est dans un mélange de « 1984 » et du « Meilleurs des mondes » que nous vivrions aujourd'hui, et en tout état de cause dans un régime totalement totalitaire... et c'est bien dans le même type de régime que nous vivrions encore, si les religieux avaient encore le pouvoir politique en France (et est-il besoin de faire appel à l'actualité des pays musulmans, pour étayer ce constat ?)...
Alors pour ne pas se tromper de débat, il nous reste quoi ? La réalité, rien que la réalité, tel que je le propose dans ce qui va suivre... et tout devient beaucoup plus simple qu'on voudrait nous le faire « croire »...
En tout état de cause, on est bien dans un débat qui appelle de notre part des réactions émotionnelles et fantasmatiques ; vouloir régler cela par des dogmes, c’est tout sauf accepter de se confronter à « l’irréalité » de ses propres réactions... et dans bien des cas masquer sous de « belles paroles », ou en se cachant derrière des dires de « sachants », mal digérées, une homophobie foncière.
D’ailleurs, tout hétérosexuel avouera sans trop se forcer, que ça n'est pas « naturel », ni une évidence, compte tenu de notre culture, d'aller à l'encontre de ce que ses tripes pourraient réactivement lui dire... Ce doit même être un travail d'introspection important de comprendre que c'est rarement « l'autre » qui nous gêne, mais ce qu'il nous renvoie de nous, surtout dans tout ce qu'il peut réveiller comme « mauvaise image de nous », quelle qu'en soit l'origine ou la fixation...
L’ethnologie et l’histoire démontrent que le modèle hétérosexuel composé des géniteurs biologiques est un « quasi-mythe »
L’histoire, c’est vraiment intéressant...
Savez-vous depuis quand les Occidentaux (pour les autres, je ne sais pas) savent comment on fait les bébés ?
C’est seulement en 1875 (!!!) qu’Oscar Hertwig déduit de ses observations qu’il faut un ovule et un spermatozoïde pour créer un enfant... Avant lui, circulait tout un tas de théories plus fumeuses, les unes que les autres (notamment celles de la création spontanée, puis des ovistes, puis des animaculistes, ...), qui n’intégraient l’action et la responsabilité du mâle que de manière totalement accessoire, et absolument pas déterminante (sauf pour les animaculistes, théorie tardive ayant précédée de peu la bonne découverte)...
Donc, toutes les théories qui fondent la légitimité du mariage sur l’organisation de la filiation génétique ne tiennent pas deux secondes à l’épreuve des faits, puisque notre organisation sociale, sur ce sujet, n’est historiquement absolument pas une conséquence de nos connaissances biologiques ! En effet, on ne peut pas soutenir que le mariage organisait la filiation biologique, puisque ça n’existait tout simplement pas dans l’imaginaire commun (le mâle n’était même pas intégré dans le processus de procréation), et encore moins scientifiquement...
J’en entends déjà certains qui vont me soutenir « qu’inconsciemment », on devait bien savoir comment on faisait les bébés... Mais non, même pas ! Les données ethnologiques s’y opposent (nous verrons ça, plus tard) ; de même qu’au cours des siècles passés, jamais l’éventuelle stérilité du mâle n’a été une cause possible de la non-fertilité du couple... La meilleure preuve, c’est que quand il n’y avait pas d’enfants, on changeait de femme... et on se doute bien que statistiquement (13 % des femmes infertiles pour 20 % des hommes), il y a eu de « vrais miracles » (avec l’aide de quelques « agents extérieurs » ), pour que certains mâles qui pendant plusieurs années ne réussissant pas à avoir d’enfants, se mettent, tout à coup à en avoir spontanément des flopées, en changeant ou pas de femme ... Bref, une sorte de ¨PMA avant l’heure...
L’humanité a donc vécu très longtemps en ignorant totalement le processus réel de procréation, tandis que l’autorité du père n’était absolument pas reliée à sa responsabilité biologique puisqu’on l’ignorait ; pire, on pensait que le mâle n’avait pas grand-chose à voir dans « l’apparition » des enfants...
De plus, les arguments sur la filiation qui tendraient à vouloir s’opposer à l’homoparentalité sous prétexte que l’enfant « doit savoir » d’où il vient, oublient encore que, jusqu’à une époque récente, la sexualité était un sujet tabou, et qu’on racontait à peu près tout et n’importe quoi aux enfants : qu’ils étaient issus d’un chou, d’une rose, que c’était la cigogne qui les avait déposés... sans, qu’à ma connaissance, ça n’ait créé plus de polytraumatisés psychologiques que cela, à part moi, bien sûr ...
Les premiers cours d'éducation sexuelle à l'école (facultatifs à l’époque et toujours avec le consentement des parents) datent de 1973 ; et encore, je me souviens également que certains profs en parlaient de façon anatomique, sans jamais parler de l'acte... et il fallait être bien curieux ou imaginatif, pour comprendre comment le spermatozoïde arrivait à l’ovule.... On n’oubliera pas l’opposition de certains religieux à l’époque à ce type d’enseignement, sans oublier qu’aujourd’hui encore dans certains pays, c’est pas gagné ; et je me demande bien comment l’Église réconcilie son exigence « de vérité » avec son opposition historique, ou encore actuelle, à la dire aux enfants ....
Cependant, je ne suis pas sûr qu’on ne se réinterrogera pas un jour sur les problèmes que pose le fait de « tout dire » aux enfants à propos de la sexualité et de leur origine. Je ne suis pas sûr que ce soit vraiment « mieux » aujourd’hui, quand on constate les ravages psychiques que la sexualisation précoce produit sur les enfants, et/ou que les générations qui arrivent apprennent « comment on fait » en visionnant des films pornos. À mon avis, nous allons bientôt découvrir de nouvelles pathologies névrotiques, consécutives à ces connaissances précoces... Et je ne suis pas sûr, alors, qu’on ne redécouvrira pas les « bienfaits » de maintenir, sauf demande exprès des enfants, un certain mystère sur les origines de leur vie.... Mais, c’est un autre débat...
L’ethnologie aussi, c’est vraiment intéressant...
Depuis la nuit des temps, le culte de la « naturalité », fondé sur les parents biologiques, ne correspond à rien de ce que l’humain a mis en pratique au niveau des organisations sociales... Mais, bien évidemment, dès qu’il s’agit de donner aux homos le droit de devenir parents, c’est à cet argument sans fondement historique que les opposants se réfèrent pour dire ce qui est « bien ou mal » pour l’enfant... C’est d’une mauvaise foi sans fond...
Depuis toujours et encore aujourd'hui, comme l’a démontré Claude Lévi-Strauss, de nombreuses cultures ne placent absolument pas le père et la mère biologique au centre des responsabilités éducatives de l'enfant, sans que ça n'ait produit plus que cela de problèmes.
Dans sa thèse sur « Les structures élémentaires de la parenté » :
- il distingue « état de nature et état de société » en démontrant qu'il existe moult modèles qui fonctionnent très bien en ignorant totalement les « lois naturelles » ;
- il conclut : « Aucune place, dans ces structures collectives, même pour une esquisse de ce qu'on pourrait appeler le modèle culturel universel : langage, outils, institutions sociales, et système de valeurs esthétiques, morales ou religieuses... »...
Donc, on ne peut pas corréler le développement d'une société et sa continuité sociale, avec un quelconque modèle familial, qui est aussi divers et a pris des formes aussi variées que les combinaisons interhumaines le permettent.
Surtout, les constats de Lévi-Strauss nous conduisent à comprendre que seuls les interdits et tabous sont fondamentaux dans la structuration psychique et ce quel qu’en soit l’objet... L’interdit de l’inceste est consécutif à l’organisation familiale, quelle que puisse en être sa forme, pas à la filiation biologique. Les « éléments psychiquement structurants » se situent dans les interdits, quels qu'en soient les objets et pas dans la forme du groupe social...
On a longtemps cru (et moi le premier, notamment à cause de la mésinterprétation symbolique des thèses de Lacan sur la forclusion du nom-du-père) que l'absence de père dans les cellules familiales était une cause des problèmes de certains mômes et adultes... Mais en réalité ce n'est pas précisément l'absence d'un père qui produit les problèmes, mais l'absence « d'autorité ». N’importe qui ou quoi - qui incarne et donne, des cadres, des limites, les interdits et l'amour - peut exercer cette fonction du « père »... et aucun environnement, fut-il celui des « parents biologiques », ne protège à coup sûr de ce genre d’absence éducative.
En interprétant les problèmes à un niveau « réel » au lieu du symbolique, ceux qui ont mal compris Lacan ont fait beaucoup de dégâts... et c’est sur les mêmes fondements biaisés que les opposants au mariage pour tous se basent aujourd’hui pour monter au rideau à la simple évocation de l’homoparentalité.
La culture des Moso (Cf. le lien ou ce documentaire) est assez signifiante, pour démontrer que la structure parentale est secondaire. C’est une millénaire société matrilinéaire (en extinction), sans mariage et sans (re)connaissance du père, où, quand il n'y a pas d'oncle, l'autorité parentale est exercée, sans partage, par les seules femmes... L’interdit de l’inceste est très fort dans les fratries, la jalousie est un péché, tandis que la liberté sexuelle en dehors de la fratrie est la règle... Presque le « paradis » pour les hommes qui voudraient vivre dans l’irresponsabilité la plus totale ; et en tous les cas, une étonnante « familiarité » avec ce que la libération des mœurs a produit depuis 40 ans, dans nos pays occidentaux... Et à ma connaissance, ces enfants et adultes, ne souffrent pas plus que d’autres de troubles psychologiques ou de psychoses...
Confondre les effets avec la cause, c’est toujours ce qui nous conduit à des conclusions hâtives, qui ne tiennent pas compte des réalités...
Il ne faut pas confondre l'organisation familiale avec la structure psychique qu'elle produit. On sait depuis plus de 60 ans (souvent sans vouloir le savoir) que ça n'a pas grand-chose à voir, tant que les « fonctions structurantes » sont présentes sous une forme ou une autre... À l’évidence, en aucune manière être né dans une famille hétérosexuelle de parents biologiques, ne garantit plus que dans d'autres modèles que ces « fonctions structurantes » seront présentes...
En réalité, on comprend bien qu’on est en train de faire aux homos le même type de procès d'intention et en incompétence parentale, que l'on faisait aux mères célibataires, il y a encore 30 ans...
Normalité et anormalité, deux concepts à géométrie variable...
Il y a une chose qui me parait très étonnante, c'est le décalage qui subsiste entre la loi et la réalité des pratiques ; mais tout autant, et peut-être même plus, entre les fantasmes, le surmoi et la réalité des pratiques... ou autrement dit, entre ce que notre pensée continue à imaginer comme « normal », alors que la grande majorité des pratiques est « anormale »...
Entre le « dire » et le « faire », il y a déjà un gouffre qui permet aux églises d'avoir longtemps abrité et protégé dans leur sein des pratiques dénoncées dans leurs paroles et par leurs « lois » ; mais, il y a en plus un imaginaire collectif (fantasmatique) totalement déconnecté des réalités vécues... parce que c'est quoi, concrètement, cette « majorité » qui se prévaut d'un « modèle universel », pour justifier de combattre le mariage pour tous ? Un petit tour d’horizon s’impose...
De mémoire approximative (chiffres de l’Insee et autres études), petits rappels de quelques segmentations sociologiques :
- de 1 à... 10 % (selon les études) des personnes assumeraient leur homosexualité en France ; et l'impossibilité d'avoir des chiffres incontestables, semble aussi difficile que de classer la sodomie hétérosexuelle (pratique très en vogue), comme une variante « normale » de cette même sexualité ; et surtout, ne dites pas à un hétérosexuel, qui aurait ce type de pratiques, qu’il vit un fantasme homosexuel, vous vous exposeriez immédiatement à un déni ;
- 10 % des pères élèveraient, sans le savoir, des enfants qui ne sont pas d’eux (pour l’anecdote : sur un forum, j’ai dû préciser à une « bigote » - qui ne comprenait pas comment on pouvait avancer ce chiffre, puisque les pères sont dans l’ignorance - qu’on obtient ce chiffre en interrogeant les mères, qui en principe, savent toujours elles, avec qui elles ont procréé... quoique... ) ;
- 40 % des personnes vivraient seules ou en famille monoparentale (plus de 50 % en IDF) ;
- 35 % des personnes vivraient en couple « recomposé », marié ou non, avec enfant ou pas ;
- seules 25 % des personnes vivraient en couple marié, « depuis toujours » ; mais on ne nous détaille pas pour cette dernière segmentation, le nombre de personnes qui s'accordent des « extras » extra-conjugaux, assumés ou cachés ; et s’ils ont des enfants ou pas, à l'intérieur ou en dehors de leur mariage ;
- tandis que toutes les études tendraient à démontrer que l'épanouissement d'un enfant, sa capacité à être heureux et équilibré, ne dépend nullement des segmentations ci-avant énoncées...
Bref, nous continuons à avoir des lois qui ne tiennent aucun compte des réalités de vie, mais plus grave encore, nos imaginaires continuent à fonctionner sur des modèles qui n'existent plus, ou du moins qui ne sont plus que des minorités : le couple, le prince charmant, la princesse charmante... et toutes ces « fadaises » imaginaires et fantasmatiques qui nous ont permis, soi-disant, de nous structurer...
Aussi, tous ces procès d'intention sur le devenir et les raisons de cette loi sont vraiment suspects et procèdent plus d'une vision imaginaire et égocentrée de la « norme » que des réalités historiques vécues et de ce que nous disent les sciences sociales...
« Nos » réalités largement majoritaires devraient donc nous pousser à faire en sorte que nos lois représentent et s'adaptent à ce que nous sommes (dans la limite des interdits fondamentaux)...
Hé bien non, 25 % des personnes continuent à dicter leur modèle, soi-disant exclusif, à 75 % des autres. Pire, alors même que nos réalités nous démontrent tous les jours, que nos imaginaires sont restés bloqués à des stades évolutifs primaires, en continuant à fonctionner sur des modèles minoritaires, il y a assez peu de gens au final, pour réellement militer pour qu'on foute la paix aux gens qui veulent vivre « différemment des autres »...
Et c'est là que l'expression « différemment des autres » ne manque pas de piquant, parce qu'actuellement ce sont les couples hétérosexuels mariés depuis toujours qui constituent une exception et une « anormalité »... Je propose d'ailleurs que nous les parquions dans des cités, où ils pourraient vivre entre eux, bien à l'abri des tentations de notre société ; sans oublier qu'ils pourraient faire appel à toutes sortes de soutiens médico-psychologiques pour assumer leur différence, ou devenir, enfin, comme « tout le monde »... Je plaisante bien sûr... quoique...
À l’évidence, il y a des domaines sombres de la psyché humaine qui nous poussent à continuer à « croire », alors même que nos réalités nous démontrent perpétuellement que nous avons tort... Je pense que pour le mariage homo, la PMA, la GPA et toute sorte d'autres problèmes soi-disant éthiques, nous sommes en plein dans cet imaginaire qui freine des quatre fers, alors même que nous vivons des réalités qui devraient dissoudre ce que nous continuons à fantasmer...
La réalité contre les croyances...
La réalité contredit les croyances et les préjugés sur l’éducation homoparentale...
À ma connaissance, seules deux grandes études sont disponibles, pour évaluer les éventuels problèmes que les modifications de schémas parentaux, consécutifs à l’homosexualité, produiraient :
- Homoparentalité état des lieux : une étude faite par des homos pour des homos qui souffre probablement d'une objectivité discutable et peut-être de nombreux biais... Mais pourquoi remettre a priori leur parole en doute ? Pour faire une analogie qui vaut ce qu'elle vaut et qui est de très mauvais aloi : est-ce qu'un chercheur cancéreux ne peut pas proposer une étude objective sur sa propre maladie ? Est-ce qu'être un grand névrosé a empêché Freud et beaucoup d'autres psys de faire avancer les psys ? Donc, même si cette étude pourrait être contestable d’un point de vue méthodologique, elle n’en conclut pas moins que : « La tendance générale est qu'il n'y a pas de différences massives entre les enfants élevés dans des familles homoparentales et les autres ».
- L’étude de Mark Regnerus (US) sur les enfants ayant eu un parent homosexuel : une « étonnante » étude mise en avant par les opposants à l’homoparentalité pour nous dire que les enfants de parents homos ont plus de problèmes que les autres. Sauf que celle-ci est hors sujet, parce qu'elle n'explore pas la segmentation des couples homoparentaux avec enfant(s), mais celle des parents ayant changé d'orientation sexuelle « en cours de route », conduisant à des couples désunis... Les mises en garde et réserves que font les producteurs de cette étude à ce propos, sont d'ailleurs très claires et honnêtes... Mais surtout cette étude tendrait à démontrer, qu’il « vaut mieux être riche et en bonne santé, que pauvre et malade » ; car le fait qu'on rencontre plus de problèmes observables chez les enfants de couples désunis n'est vraiment pas un scoop... Il est d'ailleurs probable que cette étude aurait donné les mêmes types d'écarts, avec les couples désunis tout court, sans changement d'orientation sexuelle. De même, on pourrait probablement trouver également des écarts entre les riches et les pauvres, ou en fonction du niveau d'instruction des parents, ou en fonction du type de mariage (selon les 3 régimes possibles : communauté universelle, réduite aux acquêts ou en séparation de biens)... et tant d'autres « inégalités ou différences » devant la vie... Il y a même une très « sérieuse» (Sic !!!) étude américaine qui corrèle la réussite scolaire de l'enfant avec le prénom donné par les parents (rapporté dans « Freakonomics » de S.D. Levitt et S.J. Dubner) !!!...
Addendum : Après avoir écrit ces lignes sur l’étude de Regnerus, je suis tombé par hasard sur une communication du Social Science Research (la revue qui a publié cette étude) qui après la levée de boucliers de 200 spécialistes, a fait effectué un audit par Darren Sherkat (qui est membre de son Bureau éditorial)... Ses conclusions (publiées dans le n°41 de la revue) sont sans appel : il conclut que l'article de Regnerus est très faible au niveau scientifique, et n'aurait jamais dû franchir la barrière d'un comité de lecture professionnel et compétent...
Non accessoirement, on a également le recul de pays ou d'États (pour les USA) où l'adoption par des homos est légale depuis plus de 10 ans maintenant, ainsi que la PMA et/ou la GPA (tandis qu'en France ça existe tout autant, mais de manière cachée)... et je n'ai pas l'impression que ces pays aient envie de revenir sur cette mesure, ni même que les « enfers » prédits par les anti-mariages pour tous se soient réalisés...
Aussi, comme nous le rappelle si bien Élisabeth Roudinesco (dans un article : « Indigne psychologie de bazar ») : « (...) Comment osent-ils aller à l’encontre de toutes les études sociologiques qui montrent que, depuis des décennies, les enfants élevés par des couples homosexuels ne sont pas très différents des autres enfants, et surtout que ce dont ils soufrent ce n’est pas de l’homosexualité de leurs parents, mais du regard que portent sur eux, à l’école ou ailleurs, ceux qui cherchent à les stigmatiser. (...) »
Au final, très concrètement, il n'y a rien qui puisse démontrer que les enfants de couples homos pourraient être plus « tarés », plus en difficultés, ni même plus homos que la population générale... Une démonstration in vivo de plus (si besoin en était), que les chemins symboliques des structurations psychiques empruntent des détours qui ne sont pas consécutifs à l’identification parentale ou au schéma familial ; ce que l'on savait, déjà compte tenu du nombre d'enfants qui sont devenus hétérosexuels et sans problèmes notables, malgré la privation de figures parentales distinctes : orphelins, divorcés, et autres... D'ailleurs, si le modèle hétérosexuel biologique était si fondamental que ça pour produire des enfants hétérosexuels et sans problèmes, je me demande bien pourquoi, il a généré tant d'homos, de névrosés, de psychotiques... et de familles « de Villiers »...
L'imaginaire et les constructions fantasmatiques suivent des sentiers qui n'ont pas grand-chose à voir avec la réalité... sauf en cas d'évènements traumatiques... mais là, ça ne dépend aucunement de l’orientation sexuelle des parents...
J’oserais même faire l'hypothèse que les enfants d’homos sont ou seront plus épanouis que les autres, si on arrête de les stigmatiser et qu’on les intègre dans le cadre de la loi. Pour une raison simple : c'est une question et une responsabilité tellement importante que d'avoir un ou des enfants pour des homos, que je les soupçonne, d’avoir quelque peu plus explorer leur désir, et surtout d'être qualitativement plus conscients et informés des besoins des enfants, par rapport à n'importe quel hétéro qui se retrouve parent, « parce que c'est ainsi », sans vraiment l’avoir choisi et juste parce qu’il répond à des atavismes millénaires... Mais, ce n'est qu'une hypothèse...
Personnellement, il n'y a que les faits qui m'intéressent et il faudrait que les « anti-mariage pour tous » m'apportent des éléments un peu plus probants que des croyances ou des préjugés ou même des extrapolations « théoriques », pour que ça infléchisse ce que je pense.
En attendant, je fais confiance à ce que je vois et à ceux qui m'entourent. Si j'avais pu constater parmi les couples homos, que je connais, que leurs mômes développent plus de « pathologies » spécifiques et à une fréquence plus significative, par rapport à ceux qui sont dans d'autres situations familiales, je serais le premier à m'y opposer... mais comme ce n'est pas le cas, je « nous » fais confiance pour que le « chaos » prédit par les « anti-mariage pour tous » ne devienne jamais une réalité.
Des fantasmes, toujours et encore, sur la PMA et la GPA...
J’ai lu des choses tellement irréelles sur les forums que les bras m’en sont tombés à plusieurs reprises (si, si, c’est possible ). Par exemple, beaucoup pensent que les homos se reproduisent forcément et majoritairement par PMA et/ou GPA, et que cela va produire une marchandisation des corps, et/ou une inégalité entre ceux qui pourront payer et les autres...
Une vision totalement à côté de la plaque par rapport aux pratiques... La plupart, qu’ils soient hommes ou femmes, partagent avec d’autres homos leur parentalité, et s’arrangent totalement « artisanalement » quand ils ne souhaitent pas de rapport hétérosexuel pour procréer. Il y a même des sites dédiés pour ça, comme : co-parents.fr ; où se retrouvent d’ailleurs également des hétérosexuels qui veulent être parents sans vivre en couple, ou des hommes qui veulent simplement donner leur sperme... Et il me semble assez évident que l’absence de propositions de GPA n’est due qu’au fait que c’est interdit actuellement en France. Une étrange dissociation du droit qui autorise pourtant à peu près tous les autres « dons » ou pratiques qui peuvent s’insérer dans nos vides juridiques....
La seule « inégalité » qui subsiste est celle concernant les homos hommes... Dans le cas, où ils ne souhaiteraient pas de coparentalité avec une ou des femmes, ils sont bien obligés de passer par la GPA... C'est le seul cas de figure qui peut poser problème, tous les autres arrivent quasiment toujours à trouver des solutions « artisanales », soit pour partager la parentalité, soit en faisant appel aux « dons »... et je me demande bien combien de temps la France pourra résister à la « location des corps » ou au don qui se pratique dans d’autres pays... en maintenant un droit « schizophrénique », qui par principe, refuse de retranscrire l’existence de ces enfants issus de GPA dans le registre d’état civil, les laissant sans existence légale sur notre sol et sans autorité parentale officielle pour le conjoint homo...
J’ai un « drôle » de sentiment sur cette situation, elle me rappelle tragiquement celle des enfants juifs cachés pendant la dernière guerre... à une différence notable il est vrai, c’est que ces enfants d’homos ne risquent pas la mort réelle, juste celle du néant légal ; sans oublier les tracasseries administratives sans fin pour les parents adoptifs...
Une bizarre conception de l’égalité et de la cohérence des droits, où sous prétexte que l’acte initial étant illégal, on prive ceux qui n’y sont pour rien, les enfants, de toute existence légale en France. Il faut être cohérent, soit on met les parents en taule et ces enfants dans des orphelinats, soit on accepte simplement que la parentalité civile est un fait intégrable dans notre droit.
Mais, on ne reste pas le « cul entre deux chaises » en refusant l’inscription sur les registres d’état-civil et de nationalité français sous prétexte que l’enfant a déjà un état civil aux USA, tout ça pour que l’État ne se rende pas complice d’un acte illégal, qu’il n’est pas en mesure de sanctionner par ailleurs... À l’évidence, ça n’est sûrement pas pour rien que Tartuffe a été pensé et créé en France...
Des solutions légales simples...
Parmi les bêtises lues, une « préoccupation » m’a fait tomber les derniers bras qu’il me restait... Celle d’une exigence de vérité sur les origines. Comme si les enfants d'homos ne savaient pas qu'il existe d'autres orientations sexuelles et d'autres modèles que ceux de leurs parents civils, ni comment ils sont arrivés sur terre... Comme si les couples homos allaient mentir à leurs mômes en leur faisant croire qu’ils sont issus biologiquement de leurs rapports homosexuels...
Cependant, bien qu’on ne puisse pas prouver que vivre dans le mensonge ou l'ignorance, sur ce sujet-là, serait plus pathogène (Cf. : le chapitre historique et ethnologique), c'est bien évidemment plus simple de vivre dans la « vérité ».
Caroline Fourest a fait (ou repris, je ne sais pas à qui) une proposition très simple à ce sujet, frappée du bon sens et à laquelle j’adhère totalement, tant elle permet de régler également beaucoup de problèmes pour les hétérosexuels, notamment pour les adoptions et les beaux-parents : celle de distinguer sur l'acte de naissance et l'état civil, les parents biologiques des parents civils !
Cette simple proposition, applicable également aux hétérosexuels, mettrait fin à tous les fantasmes délirants, et autorise une vraie évolution du droit qui pourrait, enfin, s’adapter aux réalités.
Elle donnerait l’autorité parentale aux seuls parents civils, et priverait les parents biologiques de tout droit non revendiqué. Elle autorise la formalisation de quasiment toutes les combinaisons parentales que nous connaissons aujourd’hui, même celle où l’enfant aurait quatre parents (s’il est issu de la coparentalité biologique de deux couples homos mariés) ; l’âne et le bœuf restant, en tout état de cause, exclus de la possibilité d’être parents , mais pas les beaux-parents, homos ou pas...
En plus, elle permet (enfin !) de donner aux hommes les mêmes droits qu’aux femmes de ne pas avoir d’enfant. De la même façon, qu’une femme a le choix de ne pas garder un enfant, il serait temps de donner ce même droit aux hommes... Actuellement, un homme ne peut pas obliger une femme à avorter, ce qui peut se comprendre ; sauf que certains sont « condamnés » (parfois des années après un rapport ou une relation d’un soir) à payer des pensions alimentaires pour des enfants qu’ils n’ont pas désirés, juste parce que des femmes ont décidé seules de garder l’enfant et gagnent quasiment systématiquement leur procédure en reconnaissance de paternité...
Une vraie injustice et inégalité qui n’émeuvent pas grand monde, même si elles s’assoient sur toutes nos lois concernant les vices du consentement.
Cette distinction juridique, entre parents biologiques et civils, permettrait d’entériner et de reconnaître des situations de fait, sans léser personne, et en respectant la « vérité » relationnelle et procréative, ainsi que d’introduire une gradation des responsabilités et des autorités, conforme à la réalité (un parent biologique et civil aurait priorité sur le simple civil qui aurait priorité sur un biologique non revendiqué, en cas de divorce dans un couple homo, mais aussi hétérosexuel).
Un père ou une mère biologique pourrait refuser préalablement toute revendication civile, sur son « don » ; de même qu’un père, mis devant le fait accompli de sa paternité, pourrait refuser la responsabilité civile, sans pourvoir s’opposer à la réalité biologique... Et si on examine à la lumière de cette proposition tous les cas à peu près possibles, je trouve que cette solution répond extrêmement bien et de façon très pertinente au soi-disant « casse-tête » des origines, des responsabilités et des devoirs... D’autant, qu’elle oblige les parents à se poser préalablement les questions : Est-ce que je veux ou pas de cet enfant ? Et dans quel cadre, j’accepte qu’il naisse ?
Une réponse simple pour une situation compliquée, c’est tout ce que j’aime...
Pour conclure... sûrement provisoirement...
Malgré tous ces développements, j’ai bien peur qu’ils ne convaincront pas ceux qui s’opposent encore au mariage pour tous. C’est ainsi, on ne peut pas convaincre un croyant que sa foi est irrationnelle... tout comme on ne peut pas convaincre un dépressif qu'il n'a aucune raison de se sentir mal, ou encore un phobique qu'il n'a aucune raison d'avoir peur... c'est le même phénomène pour ce soi-disant « débat »...
J’aime à répéter ce que Paul Watzlawick nous dit dans « La réalité de la réalité » : « L'élément le plus meurtrier de l'histoire de l'humanité est sans doute l'illusion d'une réalité "réelle" avec toutes les conséquences qui en découlent logiquement. » ; et en l’occurrence dans ce débat, force est de constater que les opposants prennent leurs fantasmes pour la réalité.
Je pense que la société ne perd jamais au change quand la loi reconnaît des droits qui permettent à des segmentations sociales, si elles respectent par ailleurs tous les cadres et interdits sociaux, de sortir de la marginalité de leur « différence »... Les serfs, les bourgeois, les esclaves, les femmes, et beaucoup d'autres ne s'en souviennent plus aujourd'hui, mais ils sont restés de nombreux siècles sans droits et différents par rapport à ceux qui en avaient, à tel point que certains n’ont même pas eu « d’âme » pendant des siècles... Continuer à laisser les homos dans la marginalité de la loi, et les laisser faire leur vie en dehors du cadre commun, est tout sauf une façon d'avoir avec eux les mêmes exigences qu'on est légitimement en droit d'attendre, notamment par rapport aux enfants...
Les opposants, pour ne pas être taxés d’homophobie, mettent volontiers en avant, sans aucun fondement réel, le souci de l’avenir des enfants. Mais qui se soucie le plus de ces enfants ? Ceux qui veulent les laisser dans la marginalité ou ceux qui pensent que leur donner un statut légal est plus important que tout ?
C'est parfois compliqué de gérer une « différence », c'est encore plus compliqué quand la société vous abandonne dedans et ne vous donne aucune existence légale. Je pense que la loi, celle qui est au-dessus de tous, doit donner à tous les parents, fussent-ils civils, et tous les enfants, fussent-ils à moitié ou totalement adoptés, le droit d'être « comme tout le monde ».
Personnellement, je ne me fous pas que ces enfants (qui existent déjà et qui sont de plus en plus nombreux) continuent à n'avoir aucune reconnaissance légale de leurs liens affectifs, ni de leur origine ; et c'est exactement dans ce no man's land, en dehors des lois communes, que voudraient les laisser ceux qui s'opposent au mariage pour tous.
En tout état de cause, tous les arguments contre ne sont que des fantasmes, rien que des fantasmes, rationalisés plus ou moins intelligemment, par des gens qui pensent défendre des valeurs, alors qu’ils ne font que démontrer qu’ils tiennent plus à leurs « croyances » et à leur imagination qu’à la réalité du monde tel qu’il est.
Il serait temps que les hommes cessent de confondre imaginaire, fantasme et réalité... combien de générations encore, pour y arriver ? Combien de durs et vains combats encore pour que les humains apprennent à vivre avec le principe d’incertitude et l’amour des « différences » ?... Des combats millénaires qui n’ont pas fini de nous occuper...
P.-S. 1 : Désolé de vous avoir infligé tant de mots, qui doivent probablement se répéter, ou paraître des évidences pour beaucoup... Je ne sais pas faire plus court sur les sujets complexes... qui recouvrent pourtant des simplicités évidentes... parce ce que de quoi on parle, en fait ? D’amour, juste d’amour, et de ses innombrables formes, sur lesquelles personne ne détient de « vérité »...
P.-S. 2 : Restez calme sur les commentaires, sinon je censurerai sans état d’âme...